La mauvaise gestion de l’épidémie aggrave les inégalités, vive la grève des loyers !

En Espagne, aux États-Unis, ou ici au sein de l’État français, les appels à la grève des loyers se multiplient face aux conséquences sociales de l’épidémie de Covid-19.

Privés d’emploi, isolés, contraints de se mettre au chômage partiel, voire au chômage tout court, pour certains n’ayant pas le droit à la moindre aide étatique… Sur la planète, des milliards de personnes subissent de plein fouet les conséquences économiques de la crise du Covid-19.

Et pour cause, dans le système capitaliste où l’économie prime sur la santé, où les entreprises produisent dans le but unique de faire du profit, il est impossible de juguler les crises, de les anticiper et d’en atténuer les conséquences. La mise à l’arrêt de la production et de la distribution de marchandises par les mesures de confinement dans de nombreux pays a pour conséquence que des centaines de millions de travailleurs se retrouvent sans emploi. Dans certains pays, des mesures de chômage partiel existent grâce aux luttes sociales intenses de ces derniers siècles et, dans ces pays, la plupart des emplois sont déclarés, ce qui n’empêche pas pourtant le Covid-19 de faire augmenter la précarité comme par exemple en Seine-Saint-Denis, au sein de l’État français.

Mais dans les pays dominés par l’impérialisme où de telles mesures de protection sociale n’existent pas, où l’immense majorité des emplois ne sont pas déclarés, les conséquences du confinement sont encore plus brutales. C’est ce qu’on a vu par exemple en Inde où des millions d’ouvriers ont fui à pied les grandes villes à l’annonce du confinement pour rentrer dans leur campagne natale, de peur de mourir de faim.

En Inde, dans les grandes villes, s’entassent des milliers d’ouvriers ayant quitté les campagnes pour trouver du travail dans les zones industrialisées. Avec l’annonce du confinement, nombre d’entre eux sont rentrés dans leur campagne natale de peur de mourir de faim.

C’est donc bien aux quatre coins du Monde que les conséquences sociales de la crise sanitaire se font ressentir, et, dans cette situation, pour de nombreux locataires, payer un loyer devient de plus en plus difficile, quasi impossible. Alors, dans plusieurs pays, des appels à la grève des loyers ont été lancés.

À Aubervilliers, entre 20% et 30% de loyers impayés en avril dans les logements sociaux

En France, dès la mi-mars, des appels timides à la grève des loyers fleurissaient sur les réseaux sociaux. Aujourd’hui, alors que de nombreux travailleurs se retrouvent avec des revenus largement amputés du fait du chômage partiel, de missions d’intérim annulées ou de petits boulots non déclarés mis à l’arrêt, dans certaines villes, un taux important de personnes ne payant pas leur loyer est constaté.

À Aubervilliers, la maire a par exemple confirmé que les bailleurs sociaux constatent entre 20% et 30% d’impayés pour le mois d’avril. Alors que le confinement dure depuis un mois et demi au sein de l’État français, et à quelques jours du début du mois de mai, il y a fort à parier que les habitants des villes les plus populaires seront très nombreux à ne pas payer leur loyer, que ce soit par manque de moyen, ou par solidarité.

Et pour cause, le déconfinement prévu le 11 mai n’annonce en rien un retour à la normale en terme d’emploi, alors, dans une ville comme Aubervilliers, où 40% de la population vit sous le seul de pauvreté, la grève des loyers est un moyen de résister dans un contexte social encore plus difficile que d’habitude.

À Toulouse également, un mouvement nommé « On ne paye plus 31 » affiche publiquement des appels à ne pas payer le loyer du mois de mai 2020, et explique sur Facebook quelques astuces pour gagner du temps dans les éventuelles procédures judiciaires qui pourraient suivre.

Aux États-Unis, le mouvement Rent Strike 2020 revendique déjà 1,5 million de soutiens !

Aux États-Unis, où le confinement a fait exploser le taux de chômage, de nombreuses personnes se retrouvent dans l’impossibilité de payer leur loyer. Dans un pays où le nombre de SDF est déjà extrêmement élevé, la question du logement est une des premières préoccupations de millions de personnes, alors, quand rien qu’en Californie 3 millions de personnes se retrouvent au chômage en quelques semaines, il est tout naturel que les appels à la grève des loyers se répandent rapidement.

Des banderoles appelant à la grève des loyers fleurissent aux fenêtres !

Aujourd’hui, le mouvement « Rent Strike 2020 » qui appelle à la grève des loyers à partir du 1er mai revendique 1,5 million de soutiens sur tout le territoire des États-Unis. Et si l’appel à un mouvement organisé de grève des loyers pour le mois de mai vient juste d’être lancé, il y a néanmoins, selon le National Multifamily Housing Council, déjà près d’un locataire sur trois qui n’a pas été en mesure de payer son loyer d’avril aux États-Unis.

En Espagne, le mot d’ordre « nous ne touchons pas nos salaires, nous ne payons pas » se répand !

En Espagne, des appels à la grève des loyers circulent également avec le mot d’ordre « Nous ne touchons pas nos salaires, nous ne payons pas ! ». Ce mouvement, lancé par plus de 200 syndicats et associations, compte sur la saturation de la justice de mesures d’expulsion pour empêcher les propriétaires de mener à bien leur procédure.

Selon les organisateurs du mouvement, quelques jours après que l’appel a été lancé, déjà plus de 15 000 personnes s’étaient déclarées en grève de loyer, et ce chiffre ne compte pas les personnes, beaucoup plus nombreuses, qui n’ont pas payé de loyer sans le déclarer aux associations ayant lancé l’appel. Par ailleurs, les 200 organisations à l’initiative de cet appel ont créé une cagnotte pour financer les éventuels frais judiciaires de locataires qui se retrouveraient poursuivis en justice par leurs propriétaires. En quelques jours, la cagnotte avait déjà récolté plusieurs dizaines de milliers d’euros.

Le loyer, c’est du vol, refuser de le payer, c’est de la résistance légitime !

Dans le Monde capitaliste, payer un loyer pour se loger est quelque chose de commun, car le logement est un marché comme un autre : les lieux d’habitation sont construits pour être vendus ou loués, et donc pour faire du profit. L’intérêt des propriétaires est ainsi de faire le plus de bénéfice possible, afin de rentabiliser les investissements. À ce propos, sur le site de la bibliothèque marxiste, on trouve un texte de l’ancien groupe Servir le Peuple – Gironde dans lequel il est écrit « Un logement existe car il a été construit par des travailleurs, mais c’est bien le propriétaire qui récolte le loyer. Pourtant, le propriétaire n’apporte pas à la société par le simple fait de posséder un logement, contrairement au travailleur qui apporte à la société en construisant le logement. En effet, sans construction de logement, il ne peut pas y avoir de propriétaire, mais sans propriétaire, il peut y avoir construction de logement. Le loyer est donc l’appropriation par un propriétaire d’une partie de la survaleur produite par les travailleurs. »

Le loyer est donc une forme de vol légal, tout comme les bénéfices des entreprises qui sont captés par les patrons : ce sont les travailleurs qui produisent tout, qui font tourner la société, et cela se voit encore plus que d’habitude en cette période d’épidémie, et pourtant ce sont bien des parasites capitalistes qui s’enrichissent, uniquement car ils détiennent le capital.

Dans ce contexte, refuser collectivement de payer un loyer est un acte de résistance, et c’est d’ailleurs une forme de lutte qui a été utilisé à plusieurs reprises dans l’histoire, comme en 1931 à Barcelone, dans les années 1970 en Italie, où, à Milan, les retards de paiement de loyers sont montés jusqu’à 20%, avec dans certains quartiers 50% des habitants qui ne refusaient de payer, ou encore de 1974 à 1980 dans les foyers Sonacotra pour travailleurs immigrés au sein de l’État français.

Des résidents d’un foyer Sonacotra en grève des loyers (1977)

Mais si la grève des loyers est une réaction légitime des masses populaires face à une situation injuste, la question du logement, elle, ne peut pas être résolue dans le cadre du système capitaliste. Non, pour trouver une solution pérenne à ce problème qui touche des milliards de personnes sur la planète, il faut abolir le système capitaliste qui transforme les besoins de la vie quotidienne en un marché. Il n’y a que dans un système socialiste de transition vers le communisme, où les moyens de production appartiendront à la communauté, où nous ne produirons pas pour faire du profit mais pour répondre aux besoins et aux aspirations de la population, que chaque personne pourra bénéficier d’un logement digne sans avoir à débourser de loyer.

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