Premier arrivé, premier servi : la course à la vaccination bénéficie en premier lieu aux bourgeois

La campagne de vaccination contre le Covid-19 a débuté il y a maintenant deux mois au sein de l’État français et, à ce jour, plus de 3,5 millions de doses ont été injectées. Mais, pour le moment, ce sont surtout les populations les plus favorisées économiquement qui en ont bénéficié, au détriment des prolétaires.

Le gouvernement a délégué la gestion du calendrier de la vaccination à des entreprises privées, en premier lieu desquelles Doctolib, leader du marché des réservations de rendez-vous médicaux en ligne. La conséquence de cela est que les rendez-vous pour se faire vacciner doivent être pris sur internet, sur la plateforme Doctolib. Or, la première étape de la campagne de vaccination concerne principalement les personnes de plus de 75 ans qui font bien évidemment partie des populations les moins connectées, qui maîtrisent le moins bien les outils informatiques. Et sur ce sujet précis, les inégalités de classe se manifestent de manière brutale : ce sont les populations les plus aisées, les habitants des beaux quartiers, qui ont accès aux outils informatiques et qui savent utiliser internet. En effet, il serait faux de dire « les vieux ne savent pas utiliser les outils informatiques », car nombre de personnes âgées, principalement les bourgeois à la retraite, savent tout à fait utiliser un ordinateur et internet. Pour les prolétaires retraités, en revanche, cela est moins vrai, et d’autant plus lorsqu’il s’agit de retraités d’origine immigrée, qui bien souvent ne maîtrisent pas très bien le français, et sont par conséquent désavantagés pour prendre rendez-vous en ligne.

Nous voyons ici les effets malsains du système de « premier arrivé, premier servi », car précisément, les premiers arrivés sont les bourgeois. En Seine-Saint-Denis, un des départements les plus pauvres de l’État français, les médecins ont bien constaté que les populations qui viennent se faire vacciner contre le Covid ne sont pas représentatives de leurs patients habituels. Dans le centre médical de La Courneuve, par exemple, lors des 15 premiers jours de la campagne de vaccination, seuls 20% des personnes vaccinées vivaient dans la commune, et 30% vivaient à Paris. Dans le journal Libération, un médecin de ce centre médical a témoigné de son étonnement : « On ne voyait pas nos habitants. Sans vouloir caricaturer, c’était plutôt tablette à la main et vêtements des beaux quartiers ». Dans les autres communes de Seine-Saint-Denis, le même phénomène a été constaté par les médecins, et corroboré par les chiffres. Et tout cela n’est pas nouveau : déjà lors du premier confinement, la Seine-Saint-Denis était un des départements les plus endeuillés par l’épidémie de Covid-19.

Pourtant, les prolétaires à la retraite font partie des populations qui ont le plus besoin d’être vaccinées en urgence : un ouvrier a, en moyenne, une espérance de vie inférieure de six ans, et une espérance de vie en bonne santé inférieure de 10 an à celle d’un cadre. Cela signifie que les prolétaires retraités sont bien plus enclins à être touchés par des comorbidités qui les rendent vulnérables au Covid-19. Cela n’est pas un hasard : une vie à l’usine, une vie sur les chantiers, une vie dans les entrepôts, ça abime, ça fatigue, ça brise le corps. De la même manière, une vie dans un quartier de banlieue, bétonné, pollué, avec un salaire qui ne permet pas de se nourrir avec des produits sains, ça détruit la santé petit à petit.

Les ouvriers devraient avoir le droit à une retraite décente, qui permet de vivre confortablement, de se faire plaisir, de faire plaisir à leurs enfants et petits enfants. Les ouvriers à la retraite devraient avoir droit à des soins de qualité, et dans le cadre de la campagne de vaccination, ils devraient être les premiers à bénéficier des précieuses doses de vaccin. Mais ce n’est pas le cas, car nous vivons dans un système capitaliste-impérialiste qui pousse à la mise en place d’une gestion de la vaccination avec comme critère principal la rentabilité. Les patrons de Doctolib n’en ont rien à faire de la santé de nos parents et grands parents, ouvriers à la retraite. Ce qui les intéresse, c’est les millions d’euros de contrats négociés avec l’État pour organiser les rendez-vous de vaccination. Alors, inévitablement, les vaccins bénéficient aux bourgeois en premier, et les prolétaires, eux, doivent attendre.

Ainsi, de la même manière qu’à l’échelle internationale les vaccins bénéficient en premier lieu aux populations des pays impérialistes, au sein de ces pays impérialistes, les vaccins bénéficient en premier lieux aux bourgeois à la retraite et non aux ouvriers retraités, qui sont par ailleurs très nombreux à être originaires des pays dominés par l’impérialisme.

Pour autant, cela n’est pas une fatalité : nous devons nous organiser, nous devons lutter pour que les vaccins soient accessibles à toutes et tous et pour que la gestion de la vaccination soit réellement démocratique, organisée par les masses populaires et pour les masses populaires, et non par quelques entreprises privées qui s’en mettent plein les poches. Cette lutte, c’est notamment celle que mènent les militants révolutionnaires brésiliens qui organisent une grande campagne de mobilisation avec le mot d’ordre « des vaccins pour le peuple, maintenant ! »

Un tag au Brésil revendiquant des vaccins pour le peuple

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