En France, la stérilisation honteuse des femmes handicapées

En France, la stérilisation honteuse des femmes handicapées

La stérilisation forcée est la pratique visant à réaliser une opération chirurgicale afin de limiter définitivement la capacité de la patiente à procréer. Cette pratique est déclarée illégale dans l’Union Européenne suite au traité de Rome de 1998, mais de nombreux pays refusent d’appliquer les directives à ce sujet, y compris en France.

 

Certains pays vont parfois jusqu’à autoriser la pratique de la stérilisation forcée sur des patientes mineures, comme en Hongrie ou au Portugal. En France, la pratique est officiellement illégale, mais de nombreuses stérilisations non-consenties sont effectuées chaque année, visant pour beaucoup des femmes présentant un handicap intellectuel, qui sont non ou peu verbales, sous tutelle ou curatelle. On estime qu’environ 2 % des femmes handicapées en France ont été stérilisées contre leur gré[1].

Pourquoi parle-t-on du caractère forcé de ces stérilisations ? Parce que c’est la famille ou le tuteur légal qui, dans l’immense majorité des cas, prend la décision pour la patiente. Cela se fait souvent sans certitude que les tenants et les aboutissants, le caractère définitif d’une telle opération, soient bien compris par la personne qui va la subir. On ne peut pas parler de consentement éclairé dans ces cas-là et il devrait dans ce cas être impossible d’après le code de déontologie de la médecine de procéder à un tel acte.

À travers cette pratique, ce que l’on peut voir c’est la non-considération de l’autonomie des personnes handicapées, le contrôle sur les corps et les psychés considérés comme déviants, jugés superflus dans le système capitaliste. Et il ne s’agit là que de la forme extrême de ce contrôle qui vise à décourager les personnes handicapées à fonder une famille, à avoir une sexualité et jouir pleinement de leurs propres corps. Cela n’est pas sans rappeler la doctrine eugéniste, visant à éliminer les « tares » en opérant à une sélection génétique des êtres humains, justifiant des stérilisations de masses de femmes « faibles d’esprit » aux USA.

Aujourd’hui les personnes handicapées sont souvent utilisées comme ouvriers bon marché dans les ESAT[2], non soumis au code du travail et permettant de les maintenir dans des conditions d’exploitations honteuses, les privant de leurs droits en tant que travailleurs. Pour rentrer dans ces établissements il est nécessaire d’être sous une forme de contraception, et les familles préfèrent parfois faire le choix de la stérilisation plutôt que d’une forme de contraception adaptée et réversible, privant ainsi du même temps leurs enfants handicapées de la capacité à décider de leurs conditions de vie et de la possibilité de fonder une famille.

Bien souvent les personnes handicapées ne sont pas considérées comme des sujets de leurs propres vies et des décisions sont prises « pour leur bien » à leur place. Stériliser quelqu’un contre sa volonté, tout comme la placer en ESAT, ce n’est pas prendre une décision pour son bien, c’est acter que sa vie ne lui appartient pas. Les personnes handicapées ne sont pas des objets et méritent de pouvoir décider elles-mêmes de leur vie, leur travail, leur sexualité, leurs luttes.


[1] Données du « Rapport sur les problèmes posés par les pratiques de stérilisation des personnes handicapées », publié par l’Inspection générale des affaires sociales en 1998.

[2] Établissement et service d’aide par le travail.

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